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interview Alain ESTARIA : traversée des Pyrénées

alpinisme.com : Bonjour Alain, tu as décidé à 44 ans, de t'offrir un challenge en traversant les Pyrénées en 21 jours. Tu partiras le 10 juillet de Banyuls pour rallier Hendaye le 30 juillet ...
Pourquoi un tel défi ?


Il y a 9 mois j'ai décidé de construire mon projet de traverser les Pyrénées (quoi de plus normal pour un passionné de montagne et de plus amoureux des Pyrénées), il se trouve que je ne peux poser facilement que trois semaines de congés d'été, et en plus le défi de traverser en temps très court (ou même record) ma intéressé, puis passionné, j'aime avoir des défis dans ma vie.

Alors voilà le projet est devenu réalité, j'aime le sport, j'aime me dépasser, depuis 25 ans de pratique de l'alpinisme, j'ai eu l'occasion de parcourir le monde en expé sur des 6000 et deux 7000m, et j'enchaîne les voyages et les expés sans oublier l'essentiel : l'amour de la nature et prendre du plaisir, je suis capable de courir 3000 à 4000m en haute montagne mais aussi et en même temps me poser et admirer le paysage pendant un bout de temps ou profiter d'être au bord d'un ruisseau (dans la même journée).

Je suis très motivé pour se challenge et même peut-être traverser en moins que 21 jours !


Pourquoi en solo ?

J'aime pratiquer la montagne seul (je suis sociable et j'ai fondé une association pour faire partager ma passion, l'un n'empêche pas l'autre), en plus j'avance à mon rythme, et pour faire le traversée en temps record c'est plus sûr de réussir étant seul, puis une envie de me retrouver moi et surtout de vivre vraiment en contact avec la nature et le milieu montagnard si familier pour moi, bien sûr je vais faire des rencontres, mais je vais absolument éviter les refuges, donc performance physique et plaisir.

Comment as-tu réglé ta logistique, ta gestion quotidienne (Nourriture - Eau - Matériel - Bivouac ...)

La logistique je la prépare depuis 6 mois, c'est pas facile ! .pour les 2 ravitaillements des proches vont venir pour me porter la nourriture pour la semaine (21 jours d'autonomie c'est trop de poids, pour la semaine hors eau j'ai presque 17kg à porter, dont 8 de nourriture), pour la nourriture, c'est pas facile ! J'ai longuement étudié la nutrition en montagne, pour conclure que tous les produits lyophilisés sont à bannir (à cause d'un index de glycémie très élevé !), je vais donc utiliser des céréales complètes sous toutes les formes : pâtes complètes, riz intégral, amarante, kamut, épeautre intégral, quinoa, boulgour intégral, les fruits secs sont excellents, du muesli bio 5 céréales sans aucune transformation ?

Pour l'eau il y en a partout dans la montagne, elle n'est pas encore polluée !(j'ai au cas où des pastilles pour désinfecter), le seul problème c'est son portage de la journée, je suis souvent sur les crêtes et donc je suis obligé de porter 2 à 3 litres !sur moi ce qui fait un sac de 18 à 19kg en début de semaine, moins vers la fin de semaine puisque j'utilise de la nourriture, à moi de bien gérer les endroits ou se trouve les sources et ruisseaux pour porter le moins possible de poids en eau.

Pour le matériel j'ai calculé au plus juste et surtout au plus léger, mon sac à vide de nourriture, d'eau et de gaz pèse à peine plus de 8kg, j'ai gagné du poids en prenant une tente bivouac de 920gr, un matelas très léger, un sac de 55 litres, c'est petit, pas facile pour tout rentrer mais j'ai économisé 700gr, très peu de change et pour la toilette, un mini savon et une mini serviette éponge, chaque grammes en moins compte, et c'est un vrai casse tête pour y arriver.

Comment aurons-nous des infos de ta part ?

Ma compagne et mes parents vont donner des nouvelles sur mon site dans la rubrique « NEWS PENDANT », j'ai un téléphone portable, je vais donc donner des nouvelles, à condition de capter ! donc bien sûr pas tous les jours.


Comment es-tu devenu un passionné d'Alpinisme ?

J'ai souvent été dans une 2ème résidence à la montagne, puis à force de voir la montagne d'en bas, un jour j'ai acheter une paire de chaussure et je suis parti tout seul, pour gravir les lacs, les cols, les sommets, puis des connaissances, l'apprentissage de l'escalade, la création d'une association avec un ami, ma première expé sur plusieurs 6000 en 1988 en Bolivie, et en suivant une course sans fin de voyages en voyages totalisant à ce jour une quarantaine de voyages dans le monde d'alpinisme, de trek dans le désert, ou des voyages sous les tropiques, pour résumer je suis passionné d'alpinisme, mais aussi et surtout de nature, de sport de nature, et de photo.


Explique-nous tes dernières expéditions. Combien de pays ? De sommets ?

Mon dernier voyage était une croisière en Polynésie, sur un petit voilier de 16 mètres, pas de grimpe ! mais voyage très actif, sinon j'étais l'été dernier en trek sur l'Indonésie, l'île de flores, à lombock pour marcher, gravir des volcans, et aussi, et surtout découvrir une autre civilisation.
J'ai gravi à ce jour plus de 1100 sommets, dont une quinzaine entre 6000 et 7500 mètres sur tous les continents (sauf les pôles), pour 40 voyages


Ton meilleur souvenir ?

J'en ai trop et dans des domaines très différents, c'est difficile d'en donner un, mon meilleur souvenir c'est cet extraordinaire enrichissement que m'a procuré cette vie d'aventurier.
En alpinisme la réussite du pic korjneuskia à 7105m et le pic du communisme à 7495m en russie.
Dans le désert c'est 15 jours en lybie de trek avec des gens extraordinaires
En trek montagne, c'est le tour du Daulhaguerie au Népal, grâce aux paysages mais surtout grâce au népalais qui sont extraordinaires, et ce souvenir au moment de se quitter, d'une émotion extrême.
Sous les tropiques, aux philippines entre busuanga et coron en navigations et nuits sur des îles désertes sous la tente, quel sentiment de liberté ici.
Et maintenant je commence un autre grand voyage avec la naissance de Mahé, elle a deux mois


Ton pire souvenir ?

Durant mes voyages j'ai eu des moments physiquement très difficiles et même extrême parfois, mais sont resté que les bons souvenir, les souffrances ont disparues de ma mémoire, je pense que mon pire souvenir est un voyage qui c'est mal passé sur le plan humain, j'apporte une importance capitale aux relations humaines, et pour moi un voyage réussi est un voyage sur lequel il y a eu des émotions entre nous et nos guides et porteurs, bien malheureusement j'ai plusieurs exemples, mais c'est aussi cela qui permets d'avoir un enrichissement personnel et de concevoir le voyage et le vie comme l'on veut, depuis 15 ans j'organise mes voyages avec des amis que je connais bien, et en traitant avec un prestataire sur place, là, dans l'échange avec eux commence le voyage, il s'établie une relation privilégiée, et puis cela permets de pouvoir construire son voyage comme dans nos rêves, avec toutes les possibilités possibles, avec une agence en France les rapports ne sont pas faciles et de plus aucun changement de programme n'est possible, bien sûr cela prends du temps mais est très intéressant .


Tu es ingénieur technicien en imagerie médicale, comment as-tu pu quitter ton travail pour réaliser ton projet ?

Bien sur je n'ai pas quitté mon travail pour réaliser ma traversée, j'ai pris trois semaines de congés, et en ce qui est de quitter mon boulot pour travailler dans le metier la montagne, je n'ai jamais voulu, une passion c'est trop précieux il faut la garder et en vivre pleinement, mais comme l'on veut sans contraintes, je pense à des amis qui sont dégoûtés par le métier de guide ou accompagnateur pour ne plus pouvoir partir avec des gens qu'ils apprécies, et ne plus faire ce qu'ils veulent dans les sports de montagnes, alors ce n'est plus une passion mais un devoir usant.


As-tu de nouveaux projets ?

Pour le moment je profite de la naissance de ma petite fille qui est adorable, qui sera peut-être une montagnarde, et je suis à fond dans cette traversée, après j'ai encore rien décidé, seulement des envies comme revenir au Népal, le Népal c'est un pays extraordinaire ou l'on reviens changé et l'on y repart.


Ta définition de l'alpiniste ?

C'est une question difficile, à quoi bon de gravir les montagnes ? Aucun intérêt disent certains, peut-être juste se prouver à soi même son existence.
Pour moi l'alpinisme n'est pas un sport mais un métier et doit être une passion, mais sans oublier l'essence même de la vie, les relations humaines et la relation avec la nature, certains alpinistes plongent comme dans une démence de réussites et d'exploits, oubliant les relations humaines, le respect des gens et de la nature, alors ces gens là ne méritent pas leur titre d'être humain.


Ton mot de la fin.

La vie est un long chemin, une longue expérience de la vie, les exploits et records physiques ne doivent pas faire oublier l'essentiel de la vie, le respect.
Peut-être mon meilleur souvenir, est d'avoir passé du temps au Népal ou en inde avec les bouddhistes, ces gens sont extraordinaires de gentillesse et de savoir vivre comment peut-on les persécuter autant ?
Certainement le mot de la fin, c'est qu'après avoir parcouru la terre entière et fait des escalades difficiles c'est bien sur l'essentiel que mon coeur bat, les relations avec les autres et avec la nature que nous devons protéger, au même titre que les civilisations isolées et persécutées, qui sont un vestige et une richesse de notre planète à protéger absolument.


Merci à toi Alain, pour ces quelques mots, nous te suivrons sur ton site ...
Renseignements : http://matraversee.e-monsite.com

Interview Réalisé par Christian COUSIN