Aujourd'hui, comble de l'éphémère, la voie a disparu
avec le dernier éboulement de la face ouest ! Située entre
le pilier Bonatti et la voie Thomas Gross, elle-aussi effondrée,
cette superbe ligne d'escalade se déroulant dans la belle protogyne
des Drus fait, à l'époque beaucoup d'envieux.
En 1986, Philippe Grenier, le guide, et Pascal Camison, l'amateur de
belles voies en libre, s'associent pour ouvrir cet itinéraire. Philippe
connaît particulièrement bien les Drus, puisqu'il a, notamment,
réalisé la voie "Thomas Gross" avec Gilles Modica
et Christophe Profit. C'est d'ailleurs depuis cette dernière qu'il
entrevoit un itinéraire possible sur la droite.
Forts d'un bel enchaînement au Grand Capucin (voie des Suisses,
voie Bonatti et voie "Voyage selon Gulliver") qui leur permet
de tester leurs compétences physiques et techniques en escalade extrême
en haute montagne, les deux grimpeurs se lancent, non sans avoir dû
attendre le retour du beau temps.
Equipés du matériel habituel d'escalade, ils s'engagent
"au culot" dans la voie nantis d'un tamponnoir pour spits. Ils
en placeront trois dans la voie. Ils tirent, derrière eux, des sacs
de 20 kg, emportant plus de 10 litres d'eau. L'escalade est sévère
- elle sera d'ailleurs cotée "Extrêmement Difficile Supérieur"
- et se déroule sur environ 600 mètres de hauteur, croisant
au passage le pilier Bonatti et la voie Destivelle.
La victoire leur est acquise au terme de trois jours et demi de grimpe,
la plupart du temps en artificielle, et de trois nuits en bivouac, la dernière
nuit en paroi les trouvant assis côte à côte au-dessus
du vide dans l'unique hamac qu'ils ont emporté. Dans cette ambiance
de murs verticaux et de surplombs, l'émotion sera à son comble
quand il faudra remonter aux jumards la corde de rappel qui, bien entendu,
s'est coincée ! |