"Dru... Druide ? Les Drus, c'est une flèche, c'est un gigantesque
menhir de granit. La Vierge a remplacé la Croix du Pardon breton.
Mais c'est aussi une représentation phallique... Rien d'étonnant
à ce que tout le monde ait envie de le gravir."
Thierry Renault pense qu'il doit être possible de "libérer"
la Directissime Américaine. Cette très belle ligne d'ascension
qui, d'un seul jet, joint le socle de la face ouest au sommet de la montagne,
est très pure, très droite. Mais elle n'a été
réalisée, jusqu'à présent qu'en utilisant les
techniques de l'escalade artificielle : A3 et même A4. Seul, un certain
Pedrini a tenté de passer "en libre", mais sans succès,
quelques points d'aide lui ayant été nécessaires.
Quatre grimpeurs se retrouvent ensemble, ce 22 juillet, au départ
du socle : Thierry Renault fera cordée avec Pascal Etienne, et Christophe
Profit avec Eric Escoffier. Un beau challenge est ouvert pour ces quatre
grimpeurs de pointe : oublier les pitons et l'escalade artificielle et n'utiliser
que les coinceurs pour l'assurance. On mettra, par ailleurs, un point d'honneur
à "sortir" dans la journée.
"Au Rognon, on se serrait la main, aux terrasses, on se demandait
qui allait passer en premier.(...) A l'époque, je transposais en
haute montagne tout ce que je savais faire en falaise. Un passage, notamment,
était très exposé : celui du premier toit. La longueur
se déroule au-dessus d'une large vire. Pendant 15 mètres,
il n'y a pas de protection possible. Une chute équivaudrait, à
cet endroit-là, à s'écraser sur la vire."
13 heures après leur départ, ayant passé des difficultés
extrêmes en montagne - des cotations de 7a et 7a+ pour les deux grands
surplombs, des passages en 6c dans chaque longueur - les grimpeurs sont
au sommet. Au passage, ils assistent, impuissants, au spectacle sidérant
de l'éboulement de la face Nord qui surprend Jean Clémenson
et son client. Ils se trouvent alors au-dessus de la cassure.
Une série de rappels les ramènera au pied de la paroi ouest
où ils ont laissé leur bivouac, heureux d'avoir surmonté
ces énormes difficultés. "Quand je pars, dit Thierry,
j'ai un objectif et à l'arrivée je me demande quel est le
résultat par rappoirt à l'objectif initial que je me suis
fixé. En montagne, il n'y a aucune règle du jeu qui ne soit
établie par un quelconque jury. C'est une question de sport, d'honnêteté
et de respect par rapport à la règle que tu t'es toi-même
fixée." |